Protection Juridique
Objectifs :
Avoir les informations concernant les mesures de protection juridique, afin de signaler toute situation préoccupante dans ce sens, et pouvoir conseiller l’entourage des personnes fragiles.
Généralités
"Le jour où ma mère a commencé à ne plus faire la différence entre 100 francs et 10 000 francs, on l'a mise sous curatelle. Les médecins ont compris qu'il y avait urgence", se souvient Mireille F., 42 ans, mère de famille.
Protéger qui ? Quand ? Et pourquoi ?
En principe, toute personne devient majeure à l'âge de 18 ans et le demeure jusqu'à sa mort.
Mais tout majeur " qu'une altération de ses facultés personnelles met dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts " peut être protégé par la loi.
Que signifie "être protégé " ?
Un majeur est dit protégé quand il perd tout ou partie de son indépendance économique et que la plupart de ses décisions sont soumises à l'autorité d'un autre majeur, son tuteur.
Que signifie " altération des facultés personnelles " ?
Le Code civil ne fournit pas de liste des maladies ou incapacités qui déclenchent une protection juridique incontestable. Mais la jurisprudence révèle qu'une difficulté ou une incapacité à concevoir un jugement ou à le formuler, des troubles de la personnalité ou des fonctions cognitives (pertes de mémoire, troubles spatio-temporels, amnésie, démence sénile, conséquences d'un accident vasculaire cérébral, maladie d'Alzheimer...) ou bien encore un empêchement dans l'expression de la volonté rend possible, pour la personne qui en est victime, une mesure de protection.
Protéger pour quoi faire ?
Sans protection légale, une personne âgée dont les capacités de jugement sont altérées peut être amenée à prendre des décisions économiques irrationnelles : céder un bien immobilier à un prix dérisoire, faire des dons disproportionnés - eu égard au service rendu - au commerçant du coin de la rue ou à ceux qui l'assistent quotidiennement.
Grâce à la protection légale, une famille peut faire annuler un acte commercial déraisonnable qu'un de ses membres aurait commis. La loi prévoit que seule la victime a le droit de contester l'acte qu'elle a passé. Mais celle-ci n'a pas toujours conscience d'avoir été lésée. Si elle le faisait, elle devrait même prouver qu'elle n'était pas consciente de ses actes au moment de la signature. La Cour de cassation a ainsi estimé, en 1993, qu'une situation d'alcoolisme chronique et invétéré au moment de la cession d'un bien immobilier ne suffisait pas à justifier l'annulation de cet acte. La protection juridique n'a donc pas pour but de brimer la liberté d'aller et de venir d'une personne mais de limiter son pouvoir de décision économique.
La sauvegarde de justice
Une mesure provisoire
La sauvegarde de justice est un régime de protection temporaire - deux mois renouvelables trois fois - des personnes dont les facultés mentales sont altérées par une maladie, une infirmité ou un affaiblissement dû à l'âge.
C'est aussi une mesure d'urgence. Le plus souvent, le juge des tutelles ordonne une sauvegarde de justice s'il a été saisi par la famille ou par un tiers d'une demande de mise en tutelle ou curatelle. L'instruction d'un dossier de tutelle ou curatelle pouvant durer jusqu'à 6 mois, la sauvegarde de justice apparaît alors comme une mesure d'urgence temporaire destinée à protéger sans attendre la personne affaiblie.
Qui peut demander une sauvegarde de justice ?
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La personne elle-même
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Un membre de la famille
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Les services sociaux
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Les proches
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Les médecins
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Le procureur
Quiconque dispose d'information dans l'intérêt de la personne à protéger.
Certificat médical
Toute demande doit être accompagnée d'un certificat médical et adressée au procureur de la République. Aucun juge ne prendra une décision sans l'avis du médecin traitant. La sauvegarde de justice ne nécessite en principe ni expertise, ni jugement.
Conséquences
Droits. La personne protégée garde ses droits civiques (droits de vote), peut retirer de l'argent ou effectuer des paiements par chèque...) et demeure libre d'administrer ses biens comme elle l'entend.
La Curatelle
La curatelle est un régime de "liberté surveillée" qui dote une personne majeure d'un " curateur " quand elle risque d'accomplir des actes qui peuvent lui nuire. Sous curatelle, une personne âgée dépendante peut ne pas être dépossédée de ses droits. En fait, tout dépend du " régime " simple, aménagé ou renforcé qui définit la curatelle. Selon la formule choisie, le juge établit alors une liste qui autorise certains actes et en interdit d'autres. Le conjoint est curateur de droit. Les autres curateurs sont nommés par le juge des tutelles.
Trois types de curatelle
- Curatelle simple. La personne âgée dépendante peut agir seule pour les actes de la vie courante : utiliser son chéquier, toucher sa retraite ou les revenus de ses placements, mais ne peut rien décider qui touche à la composition de son patrimoine (vente d'appartement, emprunt, donation, etc.
- Curatelle aménagée. Le juge tente de lister l'espace de liberté laissé à une personne dépendante.
- Curatelle renforcée. Le curateur commence déjà à se substituer à la personne protégée : il touche les revenus à sa place, effectue les dépenses principales... Bref, il gère à la place de la personne empêchée. Tout excédent devra être versé sur un compte ouvert à cet effet. Le curateur doit rendre compte de sa gestion une fois par an au juge.
Un cas à part : la Curatelle spéciale. Le majeur soumis à une curatelle spéciale peut effectuer seul les actes que la curatelle normale met à sa disposition, c'est à dire les actes " conservatoires " (renouvellement de bail par exemple..) et les actes d'administration qui concernent la gestion du patrimoine à l'exception de toute cession. Là perception des revenus de son patrimoine lui est interdite.
Quand intervient la curatelle ?
La curatelle intervient :
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Een prolongation d'une mesure de sauvegarde de justice
- A la suite d'une requête envoyée au procureur de la République ou au juge des tutelles (tribunal d'instance) par l'intéressé lui-même, son conjoint, ses descendants, ses frères ou soeurs, sa famille éloignée...
- ... mais aussi des amis, des assistantes sociales, le médecin traitant.
- La demande doit être assortie d'un certificat médical
La Tutelle
La tutelle est la mesure la plus rigoureuse de protection des adultes en situation de perte d'autonomie.
Qui peut demander l'instauration d'une tutelle ?
La procédure de tutelle s'ouvre par une lettre au procureur de la République qui transmettra au juge des tutelles.
La procédure peut être ouverte par :
- la personne âgée elle-même,
- son conjoint,
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ses ascendants,
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ses descendants,
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ses frères et soeurs,
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le curateur - si la personne est déjà sous curatelle -,
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mais aussi bien par le juge qui agit d'office.
Les autres parents, les collatéraux, les amis, le médecin traitant, voire le directeur de l'établissement où réside la personne âgée peuvent donner leur avis au juge des tutelles lequel ne peut agir que " si l'altération des facultés mentales ou corporelles du malade a été constatée par un médecin spécialiste choisi sur une liste établie par le procureur de la République ".
Si son état le permet, la personne âgée peut être entendue par le juge. L'avis du médecin traitant est nécessaire et le procureur de la République est informé. Le jugement est rendu après enquête sociale et expertise médicale. Le juge peut ordonner que le médecin traitant soit partie intégrante du conseil de famille.
Désaccord.
La partie de la famille qui récuserait le bien fondé d'une tutelle ou d'une curatelle, peut former un recours devant le tribunal de grande instance.
Le recours doit être exercé dans les quinze jours de la notification du jugement par l'intéressé lui-même, ses parents ou alliés, par lettre recommandée avec accusé de réception.